L'histoire de Yami avait commencé de façon peu originale. Il n'était pas un enfant si différent des autres, du moins au début. Il avait des parents, comme chaque autre gamin de son âge, mais je dirais que c'était sa façon de vivre qui était étrange. Sa mère, une ancienne membre de la Team Rocket, forcée de quitter son travail qui la passionnait pour l'élever, ne s'occupait pas de lui. Il n'était, alors qu'il n'avait que quatre ans, pas étonnant de voir le petit garçon se débrouiller dans la maison, réchauffer des plats préparés au micro-ondes, rester seul chez lui quand ses parents n'étaient pas là, vivre comme n'importe qui sans l'aide de personne. Quant à son père, lui aussi membre des rockets, était une personne mauvaise et profondément cruelle. L'enfant ne comptait plus le nombre de journées qu'il avait passé dans sa chambre insalubre, sans manger ou boire, car il avait été faible. L'homme passait ses journées à boire et à toucher à des choses peu légales, sans que cela ne choque quiconque. . Il avait également un petit frère, Ethan, de deux ans son cadet.
Pour tout dire, le corbeau n'était pas étonné lorsque parfois, lors des week-end, son père était arrêté par la police. Il haussait les épaules, tout en sachant très bien qu'il reviendrait d'ici peu de temps, comme toujours.
Mais plus le temps passait, plus les choses devenaient horrible. Il se souvenait très bien de ce jour, lors de son dixième anniversaire...
Sept ans en arrière.Thème musical pour toute la suite du texte (A écouter avec)Nous nous trouvons dans une salle. Dans une cave, plus précisément. Une cave si sale que les toiles d'araignée pullulaient, une odeur horrible et indéfinissable parcourait la pièce. Mais ce qui nous intéresse le plus, c'est ce qui se passe à l'heure actuelle. Plus précisément qui était là. Nous pouvons voir un petit garçon brun, qui devait tout juste avoir plus de dix, en train de livrer un combat avec un homme plus âgé, visiblement dégoûté de quelque chose.
- Sabelette, Jet de Sable !- Psyko.L'attaque du pokémon s'arrêta immédiatement, pour être renvoyée sur le pokémon avec une violence inouïe. La créature fut projetée contre le mur, poussant un gémissement de douleur sous le regard bleuté, impuissant du blondinet.
- Re-reviens, Sabelette ! Cria-t-il, paniqué, tout en rappelant le pokémon dans sa pokéball.
Tremblant, il vit l'homme s'approcher de lui, lui reprenant brutalement la sphère des mains, serrant les dents.
- Je n'arrive pas y croire ! Même avec un pokémon que je te prête, tu arrives à être faible ! Cracha-t-il, sa main levée, comme pour le gifler.
Tu ne mérites pas d'être mon fils !L'enfant ne bougea pas, se contentant de fermer hermétiquement les yeux, comme habitué à ce genre de geste. Le coup arriva vite, le faisant tomber au sol, avalant la poussière par la même occasion. Il ne put retenir les larmes qui coulaient sur ses joues, et aussitôt, son père lui donna un violent coup de pied dans l'estomac, le faisant se replier sur lui-même.
- Tu ne pourras jamais faire partie de la Team Rocket, tu m'entends ?! Tu est pitoyable... Je parie que tu n'as même pas révisé les notes que je t'ai donné !Deuxième coup. La douleur était horrible, il avait l'impression que ses os étaient brûlants et qu'il ne pouvait plus respirer.
- Allez, relève-toi ! Avait-il grogné en l'attrapant par le col, le forçant à se lever, le tirant vers la sortie.
- Attends, père.Dans un coin de la pièce, un jeune garçon aux cheveux noirs venait de se relever. Étrangement, il paraissait très calme, jetant à peine un regard à son frère.
- C'est moi qui ai pris ses notes. J'ai perdu les miennes. Déclara-t-il calmement, les bras croisés.
Presque aussitôt, la fureur du vieil homme se dirigea vers Yami, qui devait avoir tout juste une douzaine d'années, mais son regard paraissait beaucoup trop mature pour son âge. Le brun écarquilla les yeux, voulant répliquer quelque chose, mais un regard noir lui indiqua de se taire. Il lâcha son fils, se dirigeant vers l'autre qui n'avait pas bougé d'un pouce. Il lui attrapa les cheveux, le faisant grimacer, pour le tirer vers la parole, sans même jeter un coup d'œil pour le cadet.
Lorsque la porte claqua, et que le jeune garçon se retrouva seul, il se recroquevilla, gémissant, ne prenant pas en compte ses côtes qui devaient être cassées, pleurant à chaudes larmes. Car il savait très bien ce qui allait se passer pour son ainé.
Et qu'il n'avait jamais pris ses notes. O_o_O
Yami soupira, et lorsque son père quitta sa chambre, la verrouillant à double tour, attrapa une bassine d'eau propre pour essuyer les traces de ce qui s'était passé. Il avait mal, le sang sortait encore de son corps, tandis qu'il passait le l'eau sur son corps. Il aurait du pleurer comme un enfant qu'il était, hurler, gémir, lui avoir crié d'arrêter... Mais non. Car sinon, Ethan aurait été à sa place. Et lui n'aurait pas pu supporter ce genre de traitement. Il se sentait sale, blessé, son corps hurlait sa douleur, mais il ne pouvait pas pleurer. Car si, par malheur, son père entendait ses cris, tout empirerait. Il soupira, tentant d'effacer de sa mémoire ce qui venait de se passer. Ce n'était pas la première fois qu'il faisait... Ce genre de choses. La première fois, il avait craqué, avait été incapable de prononcer un mot, tétanisé par ce qui s'était produit. Sa 'chambre' puait la transpiration et une odeur particulière qu'il n'était pas sensé connaître à cet âge-là.
Si vous avez compris ce qui s'est passé, vous êtes sans doute confus devant sa réaction, mais sachez une chose ; si il ne pleure pas à l'extérieur, vous pouvez être sûr qu'à l'intérieur, il hurle à pleins poumons.
Il regarda le sol, ses vêtements -déjà en mauvais état- étaient déchirés, irréparables et visiblement, il allait devoir dormir nu. Il se glissa dans ses draps, grelottant et tremblant. Il se laissa aller, se mettant en position fœtale, enroulé dans ce qu'il pourrait appeler une couverture, encore trop sonné pour faire un geste.
O_o_O
Le lendemain, la porte de sa chambre s'ouvrit, le faisant se réveiller sur l'image de sa mère, puant l'alcool, qui lui grogna de se lever, lui jetant des vêtements propres. Enfin, propres, en meilleur état que les anciens.
Il s'habilla, sans un mot, la douleur lancinante était toujours présente, mais ce n'était pas la première fois, et il s'était habitué à ne pas la montrer. Il descendit tranquillement les escaliers, voyant que seul Ethan était là, mangeant lentement son déjeuner, les yeux baissés, incapable de rencontrer le regard de son ainé. Il se mit sur le canapé, zappant les programmes à la télévision, remerciant le créateur du canapé.
Au bout de quelques minutes de silence inconfortable et gêné, le brun se mit à parler :
- ... Pourquoi tu as menti ? Yami soupira, passant une main dans ses cheveux.
- Il est plus indulgent avec moi. Avec toi, ça aurait été pire.- Indulgent ?! Ma chambre est à côté de la tienne, j'ai tout entendu ! Rétorqua Ethan, d'un seul coup plus agressif.
Le corbeau fronça les sourcils, s'approcha de son cadet avec calme, se fichant que son corps lui criait le repos, forçant l'autre à reculer pour finir collé au mur.
- Dis-moi, Ethan... Chuchota-t-il d'une voix doucereuse à son oreille.
Tu veux prendre ma place ? Tu veux savoir ce que c'est de sentir fragile, pitoyable et impuissant ? Remarque, je parle à la mauvaise personne, car tu l'est déjà sans avoir avoir ma place...Le cadet se mit à sangloter, tandis que Yami esquissait un rictus moqueur.
- Tu sais quoi ? Tu as raison, en fait, je devrais ne plus te défendre...Il laissa sa phrase en suspens, appréciant le hoquet d'horreur de son frère.
- Mais en fait, tu est tout aussi pitoyable quand on ne t'aide pas. C'est jouissif.Il le lâcha, ricanant méchamment, se dirigeant vers le jardin. En entendant les pleurs du blond, il siffla :
- Et arrête de chialer, maman va rentrer. Il sortit, sans même chercher à savoir ce que ses paroles avaient provoquées. Mais il devait faire en sorte qu'il le déteste, pour qu'il arrête d'être triste. Yami voulait que le plus jeune le haïsse sans concession.
Sans bornes.O_o_O
Il attrapa le papillon dans sa main. Yami le regarda quelques instants, incertain. Puis il referma brutalement sa main, sentant les organes, le sang de l'insecte sur sa main. Il soupira. Il avait raison, comme toujours. Un animal, tout comme un pokémon, a une entière confiance en l'homme. Et lui n'avait pensé qu'à une chose : le tuer. Oui, il avait raison.
Faisant tomber ce qu'il restait de l'animal, le jeune garçon comprit amèrement que malgré tout, il n'en restait pas moins un homme, soit un monstre.
Trois ans plus tardLa police.
Les sirènes rugissantes, le bruit des menottes autour des poignets.
Yami regardait son petit frère, en train d'expliquer, tremblant, ce qu'ils enduraient depuis des années. Lui ne bougeait pas. Les gens se bousculaient, les photographes eux aussi, voulant voir ce qui se passait. Il ne s'occupait pas des policiers qui lui parlait, les ignorant royalement. Et lorsque le brun s'approcha de lui, le regard que lui envoya le noiraud le gela sur place.
- Pourquoi ?- Il-Il ne te fera plus aucun mal ! C'est fini, Yami !Ca ne sembla pas changer son avis.
- Sombre idiot. Si je n'ai pas appelé la police, ça veut dire que nous étions mieux ici. Tu te rends compte de ce que tu as fait ?!- De quoi tu parles ?Le corbeau serra les dents.
- Papa a une dette immense pour la Team Rocket. Si il disparaît, c'est à nous qu'elle revient !L'autre, mortifié, ne bougea pas.
- Tu comprends, maintenant ?! Espèce d'imbécile ! Cria-t-il, ameutant l'attention des policiers.
Il sentit quelqu'un l'attraper, puis une aiguille s'introduire dans ses veines. Un sédatif. Il s'endormit, tombant dans les bras de Morphée, et pour la première fois depuis des années, pour un somme sans cauchemars. Il eut juste le temps de murmurer quelque chose, une tout petite phrase que seul Ethan avait entendu.
- Je partirais.Puis ce fut le grand noir.
O_o_O
Les paupières d'Ethan se soulevèrent lentement, s'habituant à la lumière. Il constata immédiatement que le lit de Yami était vide, et fait. Il sursauta, trouvant juste une lettre sur l'oreiller.
Je vais prendre la place de papa.
Je ne veux pas que tu me suive. Tu ne me retrouveras pas. Ne me cherche pas. Je vais disparaître. Point. Si on se retrouve un jour, je ne te ferais pas de cadeau.
Il reposa le bout de papier doucement, incapable de bouger. Sans un mot, il sortit de la chambre que l'orphelinat leur avait prêté, et alla prévenir les surveillants de la disparition de son ainé. Sans être surpris. Après tout, Yami tenait toujours ses promesses...
O_o_O
Yami soupira. Il n'était pas censé être ici. Terré dans un coin des conduits d'aération, un talkie-walkie à la main, il n'avait pas vraiment l'air intelligent.
- Ici Flash Killer à Hooks, tu me reçois ? Dit-il à travers l'appareil.
- 5/5. Mise en marche de l'opération snake. Lui répondit une voix féminine.
Il coupa la communication. Très bien, à partir de ce point, tout était une question de logique. Il poussa la grille devant lui, tombant dans un petit bureau où de trouvait un ordinateur géant. Il prit sa clé USB, et le mit tout de suite dans le port USB, laissant le virus s'introduire dans le système. Au bout d'à peine une quinzaine de secondes, l'écran prit une couleur rouge, puis s'éteignit quelques instants après. Immédiatement, il remonta dans les conduits d'aération, allumant son talkie-walkie.
- Hooks, mise hors circuit du système de sécurité faite. Je sors.- Très bien. Je préviens les autres.O_o_O
Ainsi était sa nouvelle vie. Être un criminel, se battre aux côté d'autres criminels, et ne jamais se demander si ce qu'il faisait était bien ou non. Mais il s'y était, en quelque sorte, habitué. Par exemple, l'opération d'aujourd'hui consistait à voler une partie des œuvres d'art d'une bijouterie pour les revendre sur le marché noir. Yami avait empêché le système d'alarme de se mettre en marche. Soudain, il fut tiré de ses pensées par une voix bien connue.
- Alors, tu dors ?Appuyé contre un arbre, il ne pouvait pas voir la personne qui lui parlait, mais il connaissait cette voix. Il répondit, d'un ton ennuyé :
- Si c'était le cas, je ne te répondrais pas.- Touché.Elle se plaça devant lui, comme si il ne la voyait pas déjà assez. Ses grands yeux noisettes pétillants, ce corps aux courbes agréables et ce visage angélique se tenait juste devant lui.
- Qu'est-ce que tu veux ? Demanda-t-il
- Rien du tout, juste te tenir compagnie.- J'avais imaginé que tu serais rentré chez toi après snake, Claire.Elle lui adressa un sourire plein de dents bien blanches.
- J'allais pas te laisser seul ! Et puis tu aurais besoin de te détendre, de temps en temps ! Retire ton masque, d'ailleurs !Déconcerté, il se rappela qu'il avait oublié de l'enlever. Oh. Il tira son casque, libérant ses cheveux qui partirent immédiatement aux quatre coins de son crâne. Claire se mit en silence à terre, regardant le ciel.
Et c'était ça qu'il appréciait chez elle. Avec le jeune fille, il y avait ce sentiment d'acception, mais pas de pitié. Aucun des deux ne connaissaient l'histoire de l'autre, ils ne se racontaient pas leurs vies, mais leur relation était basée sur le silence. Car après tout, le silence est bien plus parlant que les mots.
O_o_O
Yami soupira. Visiblement, Ethan avait intégré la poképolice. Il le voyait grâce à la photo prise du commissariat de leur ville natale. Il balança le journal à la poubelle.
-Yami, dépêche-toi ! Cria Claire, déjà à quelques mètres.
Je te rappelle qu'on doit aller trouver ce maudit caninos !Il grogna une réponse incompréhensible, se disant que finalement, faire accepter sa décision à son crétin de frère n'était pas aussi facile. Tant pis.
O_o_O
Non. Non. Non. Non.
Non !
Ce n'était pas vrai. Pas possible. C'était une hallucination. Voilà tout. Il n'était pas là. Elle n'était pas là. Pas en train de pointer une arme sur lui. Pas en train de trahir la Team Rocket. De le trahir. Non. Pas en train de lui murmurer de se calmer, que tout irait bien, qu'ils pourraient partir ensemble, qu'il retrouverait son petit frère, qu'il pourrait être gracié... Non.
-Yami, chuchota-t-elle, le canon de son arme pointé sur lui, son doigt caressant la gâchette,
calme-toi. Tout va bien se passer.Derrière, tout les autres sbires avaient été arrêtés. Il ne manquait plus que lui. Mais elle avait voulu s'en occuper. Parce qu'elle tenait à lui. Quelle blague, pensa-t-il amèrement, elle lui avait caché tout. Depuis le début. Son rôle avait été d'infiltrer l'organisation et d'arrêter des troupes, d'obtenir des informations. Et comme un gosse, Yami lui avait fait confiance. Lui, le manipulateur, s'était fait avoir.
- Alors, c'était amusant ? La questionna-t-il d'un ton amer.
- Quoi ?- C'était amusant de jouer avec moi ? J'espère que tu t'est bien marrée, en tout cas. Qu'est-ce que j'étais ? Un pion pour ta carrière ?!Elle ne rétorqua pas. L'adolescent serra les poings.
- Quel idiot j'ai été... Te faire confiance. Vraiment.- Je n'avais pas le choix ! Mais tu l'as, toi ! Tu peux choisir de quitter la Team Rocket et de commencer une nouvelle vie !- Une nouvelle vie ? Tu veux dire une vie à se cacher ! Rétorqua-t-il, crachant presque sa phrase.
- Tu est quelqu'un de bien ! Tu mérites ta seconde chance !Immédiatement, il se calma. Et rit. D'un rire sans joie, vide de toutes émotions, glaçant.
- C'est là que tu te trompes. Je ne suis pas quelqu'un de bien, Claire. J'ai adhéré à une bande de malfrats par lâcheté, parce que je n'étais pas capable de résister. Tu vois, je suis un monstre. Après tout, est-ce que...Sa voix devint un murmure doux et dangereux, qui la fit frissonner.
- Est-ce que ce n'est pas plutôt parce que tu m'apprécies... Un peu trop ?Silence. Tous retenaient leur respiration. Yami l'avait compris. Devant la non-réponse, il soupira.
- En fait, tu est un monstre aussi. Il y a des dizaines de personnes qui mériteraient cette chance. Mais pas moi.Immédiatement, profitant du choc occasionné, il attrapa l'arme de son ancienne partenaire, et son bras avec son autre main, le positionnant le dos contre sa poitrine, le revolver contre son visage.
- Tirez et vous savez ce que je fais. Bougez.- Y-Yami !- Tais-toi. Il recula, se dirigea lentement vers un coin reculé, et libéra Claire pour partir. Son regard était sombre, désolé.
- Yami, je... Je veux que tu prenne ça.Elle lui tendit une pokéball. Il fronça les sourcils.
- Tu vas me laisser partir comme ça ?- Je... Je...Il souffla.
- Ça va. Je t'en veux mais je ne te demanderais pas d'explications. - Dans cette pokéball... C'est un Embrylex. Ma mère me l'avait donné. Marmonna-t-elle.
Il resta sceptique quelques instants et prit l'objet. Il la positionna à sa ceinture, silencieux. Il la remercia par un hochement de tête, disparaissant dans l'ombre, laissant derrière lui le seule personne à qui il avait fait confiance.
Il avait raison.
Tous des monstres.